Actualité aéronautique
Farnborough 2018 : les vols supersoniques bientôt possibles avec Boom
Article publié le 20 juillet 2018 par David Barrie
Blake Scholl, le charismatique fondateur de la société Boom, basée dans le Colorado, est venu présenter les dernières informations concernant son avion de ligne supersonique au salon aéronautique de Farnborough. Il vise désormais une mise en service pour 2025.
Boom aerospace a réuni la presse au salon aéronautique de Farnborough afin de faire le point sur son futur jet supersonique. Comme il l'avait fait au bourget en 2017, Blake Scholl (le fondateur de l'entreprise) a répété à plusieurs reprises qu’il pensait que la vitesse avait toujours été au coeur du développement de l'espèce humaine. Et comme il l'avait fait au salon du Bourget l'an dernier, son exposé a tourné autour du Concorde dont on sent qu'il s'inspire grandement tout en essayant d’en éviter les lacunes.
Selon lui, les tests en soufflerie sont moins cruciaux qu'à l'époque de Concorde. En y mettant le prix, Blake Scholl affirme qu’il a donc accès aux mêmes logiciels de simulation aérodynamique que les grands constructeurs que sont Boeing ou Airbus. De plus, les matériaux composites lui permettront de fabriquer une structure à des coûts bien moindres par rapport au métal. Au-delà de la légèreté d’un fuselage en carbone par rapport à l’aluminium, ce sont surtout les coûts de production qui pourront permettre une réelle baisse du prix de revient de l’avion. Aussi, là où le concorde s'allongeait de plusieurs dizaines de centimètres en vitesse supersonique avec son fuselage en métal, le carbone conserverait toutes ses propriétés à hautes températures et garderait sa résistance thermodynamique sans se dilater, en tout cas dans des proportions négligeables (de l'ordre de deux centimètres pour tout l'avion).
Concernant les moteurs, Boom Supersonic fera appel à des réacteurs à double flux modernes. Outre leur disponibilité immédiate, ils permettront d'être moins bruyants et plus économes en carburant. Cependant, il a aussi admis qu’il faudrait surement réduire le taux de dilution important sur des moteurs de type LeapX de CFMi ou GTF de Pratt & Whitney par exemple. Le choix de la motorisation n’a pas encore été arrêtée, mais Blake Scholl a fait comprendre à l’assemblée que ce serait le dérivé d’un moteur existant. Un réacteur entièrement nouveau serait bien sûr le plus à même de propulser l’avion, mais “bien qu’un nouveau moteur soit très tentant sur le papier, il existe toujours des risques de retards ou des mauvaises surprises”, a-t-il avoué.
Sur toutes les lèvres, est revenue la même question : comment en faire un avion bénéficiaire quand Concorde ne l’était pas ? M. Scholl a expliqué qu’il lui faudrait parvenir à une réduction d’un tiers du carburant comparé à Concorde pour que l’appareil puisse être viable et réellement bénéficiaire en compagnie aérienne. Il est évident que les grosses marges s’opèrent en première classe et en classe affaire. Pour lui, les sièges les plus chers (10% des passagers) représentent jusqu’à la moitié des rentrées d’argent sur un avion. Son modèle économique est donc simple : ne remplir ses avions supersoniques qu’avec des classes affaires et premières classes. Selon lui, réduire les coûts de Concorde de l’ordre de 30% avec cinquante-cinq passagers rendrait le vol intéressant pour les compagnies aériennes. Si elles voulaient même faire payer une prime pour la vitesse accrue, leurs marges seraient encore supérieures. Concernant son modèle économique, il a répété que le Boom Supersonic n’inventait rien et ne faisait que reprendre ce qui existait pour les classes affaires et premières.
Sa cabine ne pourra pas être configurée de plusieurs manières : à cause de sa largeur réduite, seuls deux sièges de type Business Class pourront être alignés de front, avec une allée centrale entre chaque. Pour les vols transatlantiques ou transpacifiques, Blake Scholl conseille de ne pas installer de sièges se transformant en vrais lits comme cela se fait actuellement dans les classes affaires de la majorité des compagnies aériennes ; les compagnies perdraient de la place et de ce fait, de l’argent, compromettant la rentabilité de l’avion. Sur des segments plus longs, cela serait évidemment possible, mais avec un produit différent, en première classe par exemple en installant un seul siège de front peut-être. Virgin Atlantic a été la première compagnie à signer un accord avec Boom pour avoir les dix premiers avions. Blake Scholl a déclaré que Japan Airlines était également intéressée et avait déjà effectué il y a quelques mois une avance de dix millions de dollars pour acheter vingt exemplaires. Il lui semble important que les passagers utilisent son avion comme un avion “ordinaire”, que voler à Mach 2,2 ne fasse plus partie d’une chose extraordinaire, mais rentre dans les moeurs.
L’avion supersonique de Boom permettra de voler à Mach 2,2, légèrement plus rapide que le Concorde. Un vol Londres-New York se fera en un peu plus de trois heures. Un San Francisco vers Tokyo ne prendra que cinq heures trente. Avec des exemples concrets et plutôt bien détaillés, Blake Scholl a énuméré les avantages d’un voyage à une telle vitesse. Même pour un Londres - Sydney pour lequel l’appareil supersonique aura besoin de s’arrêter deux fois en route, il faudra treize heures, au lieu de vingt-deux actuellement avec deux escales. Boom dit que son avion pourra atterrir de n’importe quelle piste pouvant accueillir un Boeing 777.
Bien que l’idée soit prometteuse sur le papier, Blake Scholl et son équipe devront montrer que technologiquement, son entreprise tient la route. Le démonstrateur XB-1 reprenant les formes générales de son avion de ligne à l’échelle 1/3 est long à construire, “plus que nous pensions”, a -t-il concédé. Toutefois, le prototype est en train d’être assemblé. Les moteurs ont même été livrés et les essais en soufflerie sont terminés. Blake Scholl espère faire voler cet appareil d’ici la fin de 2019. L’an dernier au salon du Bourget, il disait vouloir faire décoller le XB-1 dès 2018 (voir actualité).
Pour l’avion de ligne, Blake Scholl table sur une mise en service en 2025, faisant déjà glisser le calendrier prévu à l’origine. Il a précisé que son programme dépendait beaucoup du moteur. Il faudra qu’il soit sur, fiable et économe. L’aérodynamique de l’avion a aussi été modifiée pour être plus optimale. Il espère produire soixante avions par an dans son site d’assemblage.
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